La table du petit-déjeuner attend sagement les élèves. Ce lundi, un nouveau rituel s’installe sur les bancs des écoles maternelles de Grigny dans l’Essonne, avec au menu : un fruit, un produit laitier et une biscotte. Expérimentée depuis trois ans, l’initiative a été progressivement étendue à toutes les maternelles de la ville (30 km au sud de Paris). « Il s’agit de faire baisser les inégalités alimentaires, car elles conduisent à des inégalités dans les apprentissages », indique Karine Pucelle-Gastal, inspectrice de l’Education nationale sur la circonscription de Grigny, territoire prioritaire. Dans l’une des communes les plus pauvres de France, qui compte 15 écoles maternelles et 82 classes, cette mesure qui s’inscrit dans le plan pauvreté du gouvernement, annoncé il y a trois ans jour pour jour en septembre 2018, concernera près de 1800 enfants.
Dans un communiqué datant du mois de mars 2021, l’exécutif dresse le constat suivant : « En moyenne, à l’école, 3,4 élèves par classe, du CP au CM2, arrivent en classe le ventre vide. Les raisons invoquées sont, dans l’ordre, le manque d’appétit, le manque de temps, le lever précoce, le stress, l’absence des parents le matin et les raisons économiques. » En effet, les chiffres gouvernementaux rapportent que 13% des enfants scolarisés en Rep (réseau d’éducation prioritaire) et Rep+ arrivent à l’école le ventre vide « et ne bénéficient donc pas de bonnes conditions pour leurs apprentissages ». C’est en 2019 que l’Elysée s’empare du sujet et expérimente les petits-déjeuners à l’école dans huit académies et 400 établissements avant d’être étendu à tous les territoires prioritaires en septembre 2019. Mais le dispositif solidaire s’enraie avec la crise sanitaire qui freine son déploiement dans l’hexagone.
Et le constat est le suivant : en 2019-2020, 153 000 élèves en ont bénéficié, deux à trois jours par semaine en moyenne, indiquent les ministères de la Santé et de l’Education nationale. A la rentrée 2020, l’aide de l’Etat est passée de 1 euro par petit-déjeuner à 1,30 en métropole et à 2 euros en Outre-Mer. Cependant, le bilan de l’exécutif reste en demi-teinte puisque l’objectif des 200 000 élèves qu’il s’était fixé n’est pas atteint. Conscient du retard pris dans ce domaine et alors qu’une crise économique se profile, l’Elysée a remis une pièce dans la machine en mars 2021. Initialement destinée aux « territoires prioritaires », la mesure s’étend à de nouvelles écoles sur la base de critères supplémentaires. Avant pour être éligibles, les écoles devaient être volontaires et se situer dans une zone REP (réseau d’éducation prioritaire), REP + ou quartiers politique de la ville ou encore certaines zones rurales.
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Tripler l’enveloppe des petits-déjeuners
L’indicateur de positionnement social (IPS) servira d’outil pour évaluer la situation sociale des élèves et permettra d’indiquer quels sont les établissements qui doivent en bénéficier. En plus de cette extension, une autre nouveauté est apportée au printemps dernier. Tous les niveaux du primaire peuvent désormais en bénéficier contre seulement les élèves de CP, CE1 et CM2 auparavant. Et pour financer l’élargissement du dispositif, le gouvernement met l’argent sur la table : l’enveloppe de 14 millions d’euros qui a été votée lors du projet de loi de finances en 2021 pourra être triplée. Par ailleurs, le gouvernement veut mobiliser l’ensemble des recteurs et directeurs académiques et favoriser les dialogues avec les maires des grandes villes et agglomérations sur ce dossier.
« L’accès de tous les élèves à un petit-déjeuner équilibré a ainsi émergé comme une nécessité pour garantir l’égalité des chances entre les enfants et lutter contre les privations matérielles dont ils sont victimes », note le gouvernement. A la rentrée 2021, plusieurs établissements ont donc fait leur rentrée dans le dispositif. Dans le département de l’Aisne, 15 communes ont adhéré à ce mécanisme pour la rentrée 2021, contre 6 en 2020, rapporte France 3 Hauts-de-France. A Bordeaux, le dispositif s’élargit à 2000 petits-déjeuners dans neuf écoles prioritaires. Mais la mise en place de cette mesure expérimentée en 2019 dans deux écoles tests a connu quelques ajustements au niveau de l’organisation. A noter que la distribution des petits-déjeuners sera réalisée hors temps scolaire et accompagné par les agents municipaux qui travaillent dans les écoles.
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Si le périmètre de l’initiative s’agrandit, son organisation est encore loin de faire l’unanimité. En effet, certains professionnels reprochent au gouvernement de ne pas connaître la réalité du terrain et les difficultés que ce petit-déjeuner engendre. Dans la Sarthe, le maire de Coulaines Christophe Rouillon (où le petit-déjeuner est testé dans deux écoles) reconnaît au micro de France Bleu fin août que « l’idée est bonne », mais que « cela nécessite un encadrement extrêmement lourd ». L’édile affirme qu’il faut quatre adultes par classe pour gérer la distribution de la nourriture et trier les enfants qui avaient mangé ou non. Et cela à un coût souligne Delphine Labails, maire de Périgueux, chargée de l’éducation, dans Le Figaro : » Si l’Etat accorde désormais 1,30 euro – contre 1 euro l’an dernier – pour chaque petit-déjeuner, le montant total réel pour les mairies « est de 2 à 3 euros »,
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